Jour n°163 : Nous arrivons tôt à Valparaíso, la tête un peu dans le brouillard. Une fois sur place, nous attendons l’arrivée de Felipe, notre hôte. Il s’agit d’un ami de Lía qui a une chambre à louer en ville. Nous sommes un peu en avance et devons donc l’attendre. À son arrivée, nous partons en camionnette, Will sur l’espace arrière. Nous montons dans les hauteurs dans ce qui a l’air d’être un quartier typique de la ville. Ça a donc des allures de bidonville, type favela brésilienne, en plus sûr quand même. Nous passons par des escaliers étranges avant d’arriver dans les hauteurs. La maison est faite de bric et de broc dans un esprit traditionnel de la ville : charpente en bois, toit de tôle et une espèce de torchis pour maintenir le tout. Cela dit ça a son charme et la chambre est propre et nette. Ce qui ne sera pas tout à fait le cas de la cuisine et de la salle de bain. Pour finir, la vue est superbe. Au final on aime bien ce côté bohème.
Bref, nous nous installons et papotons un peu avec Felipe. Internet ne fonctionnant pas chez lui, notre première mission consistera à trouver un café qui en propose. Nous décidons donc de partir en quête. Nous descendons les rues jusqu’au marché et bifurquons en ville. Bien évidemment nous sommes un jour férié. Donc tout est fermé. Nous trouvons sur la carte l’adresse d’un Starbucks et nous hâtons dans cette direction. Nous arrivons à l’heure pour le déjeuner et oui c’est ouvert. Nous pouvons préparer un peu la suite.
Nous faisons un aller-retour jusqu’à l’appartement pour poser quelques affaires et revenir à la place où notre visite de l’après-midi nous attend. Dans le même genre qu’à Santiago, c’est à Valparaíso que les visites O’top ont commencé. Cet après-midi nous rencontrons Sarah et serons un petit groupe de six. Si quelques points d’histoire font redits avec ce que nous avions vu avec Jonathan à Santiago, beaucoup restent très différents.
Nous commençons donc sur une place importante car la plupart des sièges sociaux nationaux des métiers de la marine se trouvent autour. De plus, une statue a été érigée en l’honneur des victimes de la guerre du Pacifique. Il est intéressant de noter que le Chili a été vainqueur de cette guerre et s’est enrichi grâce aux mines de salpêtre. Ça n’est donc pas le pays ayant payé le plus lourd tribut dans cette histoire. Cette statue a été commandée par Pinochet, grand homme militaire. Ça devient moins étonnant de voir ce type de monument du coup.
Nous nous dirigeons vers le port car c’est ici que tout a commencé. Le fondateur de Valparaíso était Pedro de Valdivia. Les lieux lui ont fait penser à sa région natale et il décide donc d’y développer un port. La ville est restée modeste jusqu’à la ruée vers l’or aux États-Unis. Des navires entiers devaient remonter toute la côte de l’Amérique latine avant d’arriver à la côte ouest des États-Unis. Valparaíso devint alors l’escale obligatoire des migrants. Beaucoup s’y plurent et restèrent en ville. Malheureusement en 1914, le canal du Panama est inauguré et le passage n’est plus obligatoire au sud. Valparaíso est ruinée. La délinquance se développe et cette réputation la poursuit aujourd’hui encore.
Petite parenthèse à ce sujet. Beaucoup nous ont dit de Valparaíso que la ville est superbe mais qu’il faut y faire très attention. Même notre hôte Felipe nous a mis en garde. En fait, il s’agit de bon sens comme à Bangkok ou Paris. Le vrai problème c’est le vol à l’arraché mais ça n’arrive pas souvent ou dans certains quartiers à certaines heures. Plutôt par un manque d’attention des touristes. Nous n’avons jamais été ennuyés en tout cas.
Ce qui a donné du regain à la ville, c’est l’Unesco qui a classé plusieurs quartiers au patrimoine mondial. Les touristes ont donc commencé à venir et la ville retrouve un second souffle. L’un des quartiers est accessible depuis le port. Pour les autres il faut prendre un des ascenseurs de la ville. En réalité très peu fonctionnent actuellement. Certains sont en rénovation, d’autres à l’abandon. Nous allons en tester un pour monter sur le cerro allegre, la colline joyeuse.
Le nom de la colline vient de son utilisation à une certaine époque. C’était le quartier de la fête et des plaisirs des marins. Aujourd’hui c’est un joli quartier résidentiel où il fait bon se promener. On a une jolie vue sur la ville et le musée des beaux-arts aussi.
On y trouve notamment beaucoup d’art de rue. Notre premier mural présente deux ethnies du Chili et notamment les Mapuches. Nous en apprenons encore plus sur eux. Par exemple, quand il faut envoyer un émissaire ou un représentant du peuple pour quelque raison, ce sera toujours des femmes mapuches. On apprend également les formes de répression qu’exerce le gouvernement contre cette ethnie. De plus en plus, le gouvernement veut retirer leurs terres aux Mapuches pour la culture de l’eucalyptus. Outre que ces terres sont les leurs depuis des temps immémoriaux, les Mapuches ne voient pas d’un bon œil la culture d’un arbre qui assèche tellement la terre que plus rien ne pousse derrière. Il y a actuellement des affrontements à ce sujet. Le gouvernement envoie des milices armées dans les villages pour “récupérer ses terres ». Nous ne développerons pas plus le sujet, ne serait-ce que par manque de connaissances, mais nous trouvons important de rapporter ce laïus.
Nous continuons sur la colline suivante et empruntons un escalier coloré pour admirer de grandes fresques. Grâce à Sarah nous pouvons faire la différence entre le tag, le graffiti et le mural. Un tag sera plus de l’ordre d’une signature ou d’un mot peint à la va-vite, un graffiti sera un peu plus élaboré (formes, couleurs…), un mural est une peinture plus ou moins grande. Nous en apprenons plus sur un graffeur particulier, originaire de Chiloé. Chacune de ses fresques a un lien avec sa culture et la mer.
Plus loin nous pouvons voir une nouvelle fresque d’Inti. Elle représente la complexité et la diversité des peuples et ethnies du Chili.
Nous nous arrêtons à une petite adresse sympa où Sarah nous offre un petit verre de pisco. La boutique est tellement géniale qu’on se prend une empanada et des alfajores. On a hésité à se prendre un chocolat chaud, ils ont l’air délicieux. Mais nous avons estimé que ça serait abuser pour nos estomacs.
Nous passons encore devant une église protestante. Lorsque les colons vinrent s’installer, seule la religion catholique était autorisée. Les Anglais et les Allemands avaient du mal à suivre un culte protestant. Ils construisirent une première église, sans faste ni croix, en faisant passer le bâtiment pour un centre communautaire. Dès que d’autres cultes furent autorisés, ils construisirent une autre église, plus proche d’un standing cultuel.
Nous terminons devant un autre ascenseur qui nous permettra de revenir en ville. Nous faisons un dernier rappel historique de ce qu’a été la dictature avant de nous quitter. La visite a été très remplie et nous sommes heureux de l’avoir faite. Sarah a été une guide géniale et efficace. Nous pouvons apprécier la ville à sa juste valeur grâce à elle. Après quelques courses nous rentrons à la maison et nous reposons.
Jour n°163 :
Nous profitons de cette belle journée pour une dernière étape de visite à Valparaíso. Nous commençons par acheter les billets de bus pour le lendemain. Puis nous remontons le marché et les petites rues. Nous passons devant un des ascenseurs laissé à l’abandon. Heureusement les escaliers, eux, sont toujours fonctionnels.
Nous remontons encore plus haut sur la colline. On peut apercevoir la mer en contrebas derrière nous. Nous continuons de monter quand les premiers signes de ce que nous cherchons apparaissent. Des carreaux de poésie chilienne sont collés aux murs des maisons. Chacune a son vers et elles se partagent souvent le poète.
En vérité, nous recherchons une maison particulière. Pablo Neruda, poète incontournable du Chili et prix Nobel de littérature en 1971, a habité Valparaíso, entre autres. Sa maison nous apparaît enfin et il faut dire que l’artiste avait du goût. La vue sur la ville et la mer est imprenable et l’architecture est superbe. L’intérieur doit aussi être remarquable mais nous ne prendrons pas le temps de la visiter.
Nous repartons après nous être imprégnés des lieux, direction le centre-ville. Au passage nous croisons un des graffeurs de Valparaíso en plein travail. Son mural commence à prendre forme. Nous papotons un peu et le félicitons pour son travail. Nous descendons encore. Arrivés en ville, nous mangeons une des ces fameuses formules pour pas cher.
Nous finissons la journée au Starbucks pour avancer notre travail. Nous ne rentrerons pas trop tard. Nous croisons Felipe qui est en famille ce soir. Nous ne l’embêtons pas trop et lui disons au revoir car le bus est à 8h demain matin.