Journal de séjour #47 – Les rizières de Sapa
Le sommeil fut léger et intermittent. Entre les cahots de la route, les longs arrêts et juste l’inconfort ce fut une assez longue nuit. Le réveil n’a pas été doux non plus. Le chauffeur nous a expulsés à coup de Gangnam style remixé et à fond les baffles. Nous sortons donc du bus un peu confus, il est 5h30 (du matin), et le panorama me fait penser à un petit village de montagne suisse. Voici Sa Pa.
Nous voyons beaucoup de femmes locales (plus rien à voir avec la Suisse). Elles nous sautent dessus et nous demandent si nous avons déjà réservé. Comme c’est le cas elles nous laissent tomber sur le bord de la route, complètement esseulés. Nous ne savons pas où aller et patientons un peu. Un homme vient alors avec une liste et récupère tous les paumés dont nous faisons partie. Rebelote avec un autre bus un peu plus loin. Notre petit groupe complet, nous avançons vers un hôtel pour prendre le petit-déjeuner. Riz, banane, pancakes… tout ce qu’il faut pour assurer une bonne journée de marche. Ce sont quand même 12 km qui nous attendent.
Nous patientons en faisant connaissance et croisons deux Canadiennes qui nous ont bien conseillés. D’abord, nous devons savoir que des femmes du village que nous allons visiter nous accompagneront sur le chemin. Nous aurons l’obligation de leur acheter quelque chose à la fin du trekking. Chacune choisit une personne et l’accompagne tout le long. C’est comme ça et pas autrement. Ensuite, comme il a plu dans la nuit, nous pouvons louer des bottes en caoutchouc pour la marche. Malheureusement Will n’en trouve pas à sa taille mais il pourra faire laver les siennes au retour. Pour moi, je m’en sors avec le modèle enfant me semble-t-il. Je peux laisser mes chaussures à l’hôtel. 9h30 il est l’heure de partir.
Effectivement, un groupe de femmes habillées de façon colorée (comme notre guide) nous attend dès la sortie de l’hôtel. Nous n’avons pas fait deux mètres qu’en me retournant je vois Will en pleine conversation avec une dame âgée. Il a déjà sa partenaire. La mienne sera une jeune femme avec son bébé sur le dos. Nous avançons tous les quatre et sortons de la ville.
Nous comprenons rapidement pourquoi les bottes sont utiles. La route se change immédiatement en un chemin de terre à travers champs de maïs. Plus d’une fois nous avons dû prendre appui sur nos partenaires locales qui sont de vraies chèvres à l’inverse. La compagne de Will avec son bagout et son sourire me fait penser à la grand-mère de Moana. Elle reste pour moi la vieille folle. Elle nous a fait passer par des endroits soi-disant plus faciles. Du coup, j’imagine à peine ce que ça a dû être pour les autres. Car nous nous sommes éloignés du reste du groupe à un moment. Nous avons coupé à travers bois et j’ai quand même réussi à ne glisser qu’une seule fois mais en emportant femme et enfant au passage. Tout le monde va bien je vous rassure et à entendre les rires derrière moi Will aussi a dû faire de belles frayeurs à la vieille folle dont trois fois où il aurait pu finir sur les fesses.
C’était épique mais on a bien ri et elles nous ont vraiment bien aidés. Entre la boue et la roche glissantes, nous n’y serions pas arrivés sans elles. Heureusement la pluie n’était pas de la partie et le soleil a même pointé un rayon ou deux. Pour quel résultat ? Jugez-en par les photos.
Des rizières en terrasse à perte de vue. Nous en avons longées beaucoup. Logées entre les montagnes et traversées par une rivière, c’est splendide. Nous avons même eu la chance d’apercevoir quelques cultivateurs préparer une future rizière et planter sa voisine.
Nous arrivons vers 13h au village où nous déjeunerons mais avant ça : shopping obligatoire ! Pendant la traversée, nos compagnes nous ont tricoté un cœur avec des herbes alentour. Cela signifie quelque part que nous leur sommes attachés. Nous ne faisons des affaires qu’avec elles et chacun la sienne. On ne peut donc pas payer un truc pour deux… En guise de babiole, elles nous présentent des sacs tissés. Oui, c’est joli mais ça ne nous intéresse pas. Nous demandons quelque chose de plus petit car nous voyageons longtemps. Ça devient des pochettes tissées. C’est donc à un prix déraisonnable (pour le Vietnam – 150000 dong chacune) que nous arrivons à nous défaire de nos adorables pots de colle. Mais vu l’aide qu’elles nous ont apportée ç’aurait été déloyal de ne pas prendre quelque chose. Je crois de toute façon que c’est impossible. C’est dommage de finir sur une touche transactionnelle alors que nous avons passé de très bons moments en leur compagnie. Elles nous ont quand même offert un bracelet chacun en guise d’au revoir.
Au repas, nous avions quelques plats à disposition. Entre les nems, le poulet aux oignons, le concombre à l’ail et le tofu grillé, nous avons encore bien mangé. Une petite averse tombe à ce moment-là mais nous sommes à l’abri. Seul hic, des petites filles entre 6 et 10 ans viennent nous vendre des bracelets et autres breloques à coups de sourires tristes et supplications. Malheureusement il ne faut pas se laisser attendrir où vous vous trouvez sur la paille en moins de temps qu’il en faut pour le dire. C’est en mode sans-cœur donc que je leur dis non. Will a beaucoup plus de mal à s’en défaire, on sent qu’il est plus gentil. Qu’à cela ne tienne, nous finissons le repas sans achat autre que la boisson.
Nous repartons pour encore deux kilomètres, sur route cailloutée cette fois, pour atteindre l’auberge où nous allons dormir. Nous avons choisi de dormir chez l’habitant, nous arrivons donc dans une petite maison avec mezzanine pour accueillir les visiteurs. On nous a réservé une chambre à part, nous avons donc un lit double et sa moustiquaire au rez-de-chaussée. On nous sert du thé et nous avons un temps libre jusqu’à la fin de l’après-midi. Papotage de groupe, nous nous offrons quelques bières, ce qui permet à nos hôtes de nous servir des cacahuètes grillées et salées sans doute par leur soin. Certains vont prendre leur douche, d’autres se reposent, d’autres encore vont se balader… Will ? Il fait sa lessive.
À cinq heures, notre hôtesse principale nous emmène dans le jardin pour prendre quelques petites choses pour le repas. Nous cueillons du maïs, quelques haricots et du piment vert. Puis nous les préparons pour la cuisine. Tout le monde est mis à contribution, qui émince des champignons, qui s’occupe des oignons, certains de râper quand les autres coupent. Et c’est ainsi que nous savons enfin ce qu’il y a dans les nems (je ne dirai rien).
Nous préparons les tables, le temps que la cuisson se fasse et nous nous retrouvons devant un festin. Pendant que nous mangeons, nous avons l’occasion de trinquer à coup d’alcool de riz vietnamien, très bon mais (extrêmement) fort. Nous finirons la soirée à passer des chansons qui nous plaisent de tous les genres. Nous devrons encore marcher demain, nous décidons de nous coucher tôt pour rattraper la nuit précédente.